Un test pour confirmer le diagnostic de maladie d'Alzheimer ?

Des chercheurs américains ont développé un nouveau test sanguin permettant de repérer de manière efficace les personnes susceptibles de développer la maladie d'Alzheimer au cours des trois années suivantes, selon une étude publiée le 10 mars 2014, dans la revue scientifique Nature Medicine. Ce test permettra avant tout de confirmer une maladie d'Alzheimer suspectée. Entretien avec le Pr Bruno Dubois, neurologue et chef de service des maladies cognitives et comportementales de l'hôpital La Pitié-Salpêtrière, à Paris.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
Entretien avec le Dr Stéphane Epelbaum, neurologue chercheur à l'Institut de la mémoire
Entretien avec le Dr Stéphane Epelbaum, neurologue chercheur à l'Institut de la mémoire

Décrit dans la revue médicale Nature Medicine, le test sanguin permettrait de prédire l'apparition de la maladie, avec une précision atteignant les 90%. Basé sur l'identification de dix lipides dans le sang, le test pourrait faire l'objet d'essais cliniques dans deux ans, précisent les chercheurs.

"Notre nouveau test sanguin offre la possibilité d'identifier les personnes à risque de déclin cognitif progressif et peut changer la manière dont les patients, leurs familles et les médecins traitants envisagent de gérer la maladie", souligne le Dr Howard J. Federoff, le principal auteur de l'étude, chercheur à l'Université Georgetown de Washington (Etats-Unis).

Pour le Pr Bruno Dubois, neurologue et chef de service des maladies cognitives et comportementales à l'hôpital La Pitié-Salpêtrière, ce test sera avant tout un outil de confirmation du diagnostic de la maladie d'Alzheimer.

"Je ne vois pas l'intérêt de faire le diagnostic d'une maladie pour laquelle nous n'avons pas de traitement à proposer", explique le Pr Dubois.

"La maladie d'Alzheimer est une démence aux symptômes non spécifiques. Des patients atteints de pathologies neuro-dégénératives différentes ont les mêmes signes cliniques que ceux de la maladie d'Alzheimer. Il est parfois difficile de trancher entre la maladie d'Alzheimer et un autre type de démence.

"Il y a d'ailleurs beaucoup d'erreurs de diagnostic car nous n'avons pour l'instant aucun moyen d'avoir une certitude diagnostic en pratique courante. A mon sens, ce test biologique sera utile pour confirmer la maladie d'Alzheimer des personnes chez qui on suspecte ce type de démence devant un ensemble de symptômes cliniques", ajoute le neurologue.

La piste des lipides dans la forme précoce d'Alzheimer

Des travaux sont en cours depuis de nombreuses années pour tenter d'identifier des biomarqueurs précoces, lorsque cette maladie est encore asymptomatique, pour pouvoir intervenir le plus tôt possible afin de ralentir le déclin cognitif.

Les neurologues américains ont découvert l'intérêt des lipides, en surveillant la composition sanguine de 525 personnes de plus de 70 ans, en bonne santé, et pendant une durée de cinq ans.

Au bout de trois ans, ils ont comparé un groupe de 53 personnes ayant développé une forme précoce d'Alzheimer, ou des problèmes cognitifs, à un groupe témoin de 53 personnes non atteintes. Ils ont découvert que le niveau de dix lipides contenues dans le sang était plus bas chez les premières que chez les secondes.

Les chercheurs ont ensuite reproduit le résultat en aveugle chez des malades confirmés d'Alzheimer, comparés à des personnes qui n'étaient pas atteintes, avec un taux de précision de 90%.

"Cette étude montre que la présence en faible quantité de certains facteurs lipidiques est associée à la survenue d'une maladie d'Alzheimer. Mais cette conjonction est associée seulement à la population étudiée dans cette étude. Il est absolument primordial d'analyser la reproductibilité de ce test.

"Si une autre étude obtient les mêmes résultats sur une autre population, on pourra alors conclure à une fiabilité du test et considérer que les lipides analysés sont des biomarqueurs de la maladie d'Alzheimer", conclut le Professeur Dubois

Source : Plasma phospholipids identify antecedent memory impairment in older adults. Mapstone et coll. Nature médicine. Mars 2014