Cancer ORL : chirurgie et reconstruction

Les cancers de la bouche, du pharynx et du larynx représentent 12% de tous les cancers. La France est au premier rang mondial de ces cancers dits des voies aérodigestives supérieures (VADS), juste après les cancers du poumon. C'est dire à quel point il faut améliorer la détection précoce.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Cancer ORL : chirurgie et reconstruction

Qu'est-ce qu'un cancer ORL ?

Petite plaie dans la bouche, gêne à la déglutition, présence d'un ganglion dans le cou… ces symptômes assez anodins peuvent passer inaperçus. Pourtant, il faut être vigilant car il s'agit parfois des premiers signes de cancers qui touchent les voies aérodigestives. Environ 20.000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. Dans neuf cas sur dix, cela concerne des hommes, en général âgés de plus de 50 ans.

Les cancers ORL sont très nombreux. Certains touchent la partie supérieure des voies digestives, ils s'étendent des lèvres à l'œsophage. D'autres concernent les voies respiratoires supérieures, ils s'étendent des narines jusqu'à la trachée. Dans plus de 95% des cas de cancer, il s'agit de carcinomes. Ils se développent au niveau de la muqueuse qui tapisse aussi bien la cavité buccale que les autres voies aérodigestives.

Le tabac, l'alcool ou d'autres substances chimiques cancérigènes peuvent déclencher le mécanisme de cancérisation au niveau d'une cellule de la muqueuse. Elle devient anormale et se multiplie de façon anarchique, ce qui développe une masse : c'est la tumeur maligne, le cancer. Problème, ces cancers ont une évolution silencieuse. Au début, ils sont presque tous indolores. Les signes varient selon la localisation du cancer.

Cancers ORL : établir un diagnostic précis

Les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) sont souvent diagnostiqués trop tard. Les patients ne se méfient pas assez des maux de gorge qui durent, des douleurs de la déglutition ou du nez toujours bouché. Il est alors prudent de consulter un ORL pour un examen clinique.

"Il faut vraiment être très sensible aux symptômes, et notamment à tout symptôme au niveau de la gorge qu'il s'agisse de gêne à la déglutition, une gêne pour parler, une gêne pour respirer, une douleur qui persiste au delà de quinze jours… Dans ce cas, il faut un examen ORL", explique le Pr Frédéric Chabolle, chirurgien cervico-facial.

Une fibroscopie peut être réalisée lors de l'examen ORL. À l'aide d'une caméra miniature introduite dans la narine, le chirurgien peut examiner l'arrière de la gorge et ainsi localiser la tumeur.

La palpation des ganglions est un geste fondamental car dans les cancers ORL, les ganglions lymphatiques du cou sont très souvent envahis par des cellules cancéreuses. Pour les repérer et déterminer l'étendue du cancer, le patient passe un autre examen : un TEP-scan, tomographie par émission de positrons. Le TEP-scan est un scanner du corps entier associé à l'injection d'un produit radioactif, du sucre fluoré, qui permet de repérer tous les tissus colonisés par le cancer.

Les patients peuvent également subir un prélèvement de tissu au niveau de la zone suspectée. Après ce dernier examen, l'équipe médicale peut alors proposer au patient l'intervention la plus adaptée à son cancer.

Cancers ORL : retirer la tumeur et reconstruire le visage

Une laryngectomie est une intervention chirurgicale qui consiste à retirer une partie ou la totalité du larynx dans le cas d'un cancer ORL. Elle est souvent accompagnée d'une ablation des ganglions du cou qui contiennent souvent des cellules cancéreuses.

Une laryngectomie est une intervention qui dure en moyenne cinq heures et se fait sous anesthésie générale.

Cancers ORL : une chirurgie assistée par un robot

Il existe une autre solution thérapeutique moins invasive que la chirurgie. En effet, les tumeurs peuvent être retirées par un robot piloté par le chirurgien. Un des avantages de cette technique est que le malade n'est pas ouvert, tout passe par sa bouche.

Cancers ORL : les suites post-opératoires

Pour de nombreux cas de cancers ORL, les chirurgies sont souvent lourdes. Un suivi post-opératoire est alors essentiel pour aider le patient à s'adapter à ses nouvelles sensations, notamment lorsqu'il s'agit de la bouche.

Cancers ORL : l'incidence du papillomavirus

Alcool et tabac sont souvent considérés comme les principaux facteurs de risque de développement des cancers de la sphère ORL. Aujourd'hui, les papillomavirus sont aussi surveillés de près pour leur incidence réelle sur l'émergence de certains de ces cancers. Les explications avec le Pr. Lacau St Guily, cancérologue et ORL à l'hôpital Tenon de Paris.

  • Qu'appelle-t-on "papillomavirus" ?

Pr. Lacau St Guily, cancérologue et ORL : "Les papillomavirus (HPV en anglais comme "human papillomavirus") sont des virus responsables de très nombreuses sortes de lésions muqueuses et cutanées, le plus souvent bénignes comme les verrues. Parmi la centaine de types connus, il en existe une quinzaine qui sont à haut risque car ils sont associés à des lésions cancéreuses ou précancéreuses des muqueuses ano-génitales comme le col de l'utérus ou des voies aérodigestives supérieures et donc certains cancers de la sphère ORL."

  • A-t-on une idée de la proportion de cancers ORL dont l'origine serait le HPV ?

Pr. Lacau St Guily : "Ce sont les cancers de l'oropharynx, contrairement aux autres localisations qui sont fortement associés aux papillomavirus. L'oropharynx est placé en arrière de la cavité buccale, il s'agit de la zone délimitée de chaque côté par les amygdales. Une étude rétrospective publiée en 2011 et réalisée sur les années 2000 à 2008 en France, montre qu'environ la moitié des cancers de l'oropharynx sont associés à ces virus et ce chiffre monte à 55 % et au-delà pour les localisations amygdaliennes."

  • Que sait-on de la transmission du papillomavirus et de son incidence sur les cancers de l'oropharynx ?

Pr. Lacau St Guily : "La muqueuse oropharyngée, autour des amygdales, est une zone plus exposée aux infections chroniques. De plus, il semble que l'infection virale à HPV soit très fréquente, très précoce dès les premiers rapports sexuels et concernerait 75 % des adultes en Occident. Mais le plus souvent, le virus va disparaître et ne jamais donner de cancer, il n'est donc pas question de présenter ces cancers HPV-associés comme une maladie sexuellement transmissible et stigmatisante."

  • Quelles sont les mesures de prévention permettant de limiter ce risque ?

Pr. Lacau St Guily : "Les vaccins anti-HPV bivalents ou tétravalents sont proposés pour les jeunes filles avant le début de leur vie sexuelle dans le but d'améliorer la prévention des cancers du col et aussi de l'oropharynx. Il est trop tôt pour évaluer leur action à terme sur l'incidence de ces cancers. Certains pays recommandent aussi la vaccination des garçons, ce n'est pas le cas en France."