Tatouage : les aiguilles potentiellement allergisantes

Une équipe de chercheurs internationale a élucidé le rôle des aiguilles des tatoueurs dans les réactions allergiques aux tatouages. Ces réactions peuvent également toucher d’autres parties du corps.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Tatouage : les aiguilles potentiellement allergisantes

Après l'encre, les aiguilles : une équipe internationale de chercheurs a montré que des particules du métal des aiguilles utilisées lors de tatouages pouvaient migrer dans le corps, au risque de provoquer des allergies.

L'équipe qui a mené cette étude, publiée mardi dans la revue spécialisée Particle and Fiber Toxicology, a été dirigée par des chercheurs de l'Institut fédéral allemand d'évaluation des risques. Elle a aussi impliqué des scientifiques du synchrotron européen de Grenoble (Isère) et plusieurs instituts et universités allemandes.

Si les pigments utilisés sont régulièrement mentionnés pour expliquer les allergies au tatouage, c'est la première fois que le rôle des aiguilles des tatoueurs est ainsi relevé.

Une conséquence de l’abrasion des aiguilles

Les métaux mis en cause dans les réactions allergiques sont le nickel et le chrome. "Les particules de chrome et de nickel provenant de l'abrasion d'aiguilles de tatouage migrent vers les ganglions lymphatiques", relève l’équipe de chercheurs. Ces métaux provoquent des réactions d'hypersensibilité et peuvent donc jouer un rôle dans les allergies au tatouage."

La libération des particules métalliques est plus particulièrement due à l’action du dioxyde de titane – un pigment blanc, souvent utilisé en mélange avec des pigments rouges verts et bleus pour en moduler la couleur- de l’encre et l’acier de l’aiguille. "C’est une réaction mécanique, précise à allodocteurs.fr Hiram Castillo, scientifique au synchrotron européen de Grenoble (ESRF) et co-auteur de l’étude. Le dioxyde de titane altère la surface des aiguilles, ce qui produit des particules de nickel et de chrome, qui se déposent avec l’encre. Les ions de nickel et de chrome libérés à partir de ces particules suite à des réactions dans l’organisme peuvent induire une sensibilisation ou réaction allergique."

A noter qu'aucun effet n'a pas été observé avec un autre type d’encre testé par les chercheurs, l'encre noire de carbone.

Nickel, chrome… quand le corps sature et réagit

Les particules métallique peuvent provoquer des réactions cutanées locales dès le moment du tatouage, mais pas seulement. Les effets peuvent se produire en décalé dans le temps, mais aussi à d’autres endroits du corps. Tout dépend du potentiel allergisant du nickel et du chrome chez chaque individu, du niveau d’exposition et du seuil de déclenchement des symptômes.

"Les particules peuvent migrer dans les nodules lymphatiques. Elle sont alors exposées à des cellules du système immunitaire, et peuvent, de la même manière, provoquer sensibilisations et réactions allergiques", continue Hiram Castillo. Notamment à la "prochaine rencontre" avec ce type de métaux, comme lors de l’inhalation de particules ou de la pose d’une prothèse, qui pourra alors être rejetée. "Nous avons aussi référencé dans la littérature, par exemple, le cas d’un homme dont un tatouage s’est mis soudainement à gonfler après la pose d’une prothèse", rapporte le scientifique.

Information et prudence avant de se faire tatouer ?

Les réactions indésirables liées à la mode du tatouage, à laquelle ont adhéré 18% des Français de plus de 18 ans, sont devenues courantes, relèvent les auteurs de l'étude.

"Ce que notre étude a mis en évidence peut être utile pour les consommateurs, estime Hiram Castillo. Connaître le type de pigment, voire même faire un petit test avant de se faire tatouer est intéressant. Et si on réagit déjà à un bijou en nickel, par exemple, un tatouage n’est peut-être pas une bonne idée."

Mais selon Ines Schreiver, premier auteur de l'étude, "l’impact exact sur la santé" des tatouages ne peut pas toutefois être encore mesuré. "Ce sont des effets à long terme qui ne peuvent être évalués que par des études épidémiologiques qui surveillent la santé de milliers de personnes sur des décennies".