Une injection antirides mal réalisée peut-elle conduire à la cécité ?

Mal réalisée, une injection antirides (acide hyaluronique, collagène, etc.) peut, dans de très rares cas, entraîner une perte définitive de vision, comme le rappelle un article publié, le 6 mars 2014, dans la revue Jama Ophtalmology. Explications.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Une injection antirides mal réalisée peut-elle conduire à la cécité ?

Les cas de cécité consécutive à l'injection de produits de comblement des rides sont rarissimes : dans toute la littérature médicale, moins d'une cinquantaine de cas sont rapportés. Ils démontrent toutefois que cette procédure n'est pas totalement anodine, et doit être effectuée dans les règles de l'art par un médecin compétent.

Ces produits injectables - qui sont, rappelons-le, considérés comme des dispositifs médicaux - sont habituellement classés en trois catégories : les substances résorbables (dérivés pour la majorité d'acide hyaluronique d'origine animale, qui persistent dans l'organisme moins de six mois), les substances "lentement résorbables" (moins de deux ans) et les substances non résorbables (polymères acryliques, gel de polyacrylamide, etc.). L'utilisation de ces dernières est déconseillée par l'Agence française du médicament (ANSM).

Quel que soit la nature du produit utilisé, le plus grand danger consiste vraisemblablement dans son injection dans une veine : le produit de comblement pénètre dans l'artère centrale de la rétine(1) et peut boucher celle-ci (embolie) ou s'intègre aux tissus rétiniens, conduisant dans les deux cas à des pertes irréversibles et graves de la vue.(2) Ce risque apparaît essentiellement associé à des injections réalisées dans la partie haute du visage (front, contour des yeux, nez).

A l'issue d'une analyse de trente-deux cas de cécité liés à une telle erreur de manipulation, des chirurgiens italiens ont détaillé en 2012, dans la revue Plastic and Reconstructive Surgery, les précautions simples qui doivent permettre au praticien d'écarter un tel risque.

Après avoir positionné l'aiguille, et avant d'injecter le produit, le praticien "doit réaliser une courte aspiration" qui lui confirmera qu'il n'a pas piqué dans une veine. L'application d'un vasoconstricteur local est d'ailleurs supposée écarter tout risque.

Injecter de faibles quantités de produits, en appliquant une pression faible, apparaît "plus sûr". L'utilisation d’aiguilles, seringues et canules de petite taille est enfin à privilégier.

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(1) L’artère centrale de la rétine est une branche de l'artère ophtalmique située sous le nerf optique.
(2) Comme le rappelle les auteurs de l’étude italienne mentionnée plus bas, "aucun traitement efficace ou sûr n’existe pour résorber ce type d’embolie rétinienne".

 

Sources :

  • Cosmetic Facial Fillers and Severe Vision Loss M. V. Carle, et coll. JAMA Ophthalmol. 6 mars 2014. doi:10.1001/jamaophthalmol.2014.498
  • Blindness following Cosmetic Injections of the Face. D. Lazzeri et coll. Plastic & Reconstructive Surgery, avr. 2012. doi: 10.1097/PRS.0b013e3182442363
  • Iatrogenic retinal artery occlusion caused by cosmetic facial filler injections. S.W. Park et coll. Am. J. Ophtalmol. Oct. 2012 doi:10.1016/j.ajo.2012.04.019

En France, plus d’une centaine de produits injectables antirides sont commercialisés. Selon des chiffres de fin 2011, 600.000 seringues seraient vendues chaque année sur le territoire. (Source : ANSM)