Séisme au Népal : une situation sanitaire dramatique

Un séisme a frappé le Népal le 25 avril 2015. Plus de 7.500 personnes ont été tuées, 14.500 autres blessées. Si l'urgence est passée, les Népalais ne sont pas pour autant sortis d'affaire. Les besoins sur place restent énormes. Les explications avec Magali Cotard.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
La situation sanitaire au Népal - Chronique de Magali Cotard du 6 mai 2015
La situation sanitaire au Népal - Chronique de Magali Cotard du 6 mai 2015

Dans ce genre de catastrophe, on pourrait penser que l'aide la plus essentielle est celle qui est apportée dans les premières heures, les premiers jours pour sauver les blessés coincés sous les décombres. Mais aujourd'hui, la population a toujours besoin de soins, à Katmandou, mais pas seulement. La plus grande partie de la population touchée est aujourd'hui isolée dans la montagne et coupée du monde. Et le pays aura plus que jamais besoin d'aide internationale dans les semaines et les mois qui viennent.

D'après les ONG contactées, les hôpitaux et les équipes médicales locales ont fait un travail remarquable. Lors d'une telle catastrophe, il est par exemple fondamental de réussir à mettre en place un triage efficace à l'arrivée des blessés pour sauver un maximum de victimes. Et les équipes sur place l'ont très bien fait et elles ont su gérer les premiers soins et les chirurgies dans l'urgence, à Katmandou. Les autorités ont aussi envoyé des hélicoptères pour chercher dans les zones reculées les blessés les plus touchés.

Les blessures inhérentes aux séismes

Les blessures inhérentes aux séismes sont des fractures très complexes, avec des traumatismes de la moelle épinière, des lésions à la tête aussi, et les membres sont parfois tellement écrasés que l'amputation est nécessaire. Il est encore impossible de connaître le nombre de personnes amputées, mais on sait que ce séisme en zone urbaine a fait de gros dégâts à cause du type de constructions.

À Katmandou, les constructions sont en béton. Et quand les constructions sont en béton, les blessures sont plus importantes. Les ONG ont constaté la même chose lors du tremblement de terre à Haïti, alors qu'aux Philippines, où un typhon avait ravagé le pays en 2013, les constructions étaient en bois, et n'avaient pas entraîné ce genre de blessures. Dans leur malheur, les Népalais ont eu un peu de chance : le séisme a eu lieu à midi et à cette heure, la plupart des habitants sont dehors. Si le séisme avait eu lieu en pleine nuit, le nombre de morts et de blessés aurait été encore plus important.

Des besoins immenses

Les fractures nécessitant une chirurgie immédiate ont été prises en charge. Aujourd'hui, les hôpitaux se désengorgent, mais les semaines et les mois qui arrivent s'annoncent difficiles. Les blessés ont vite été renvoyés des hôpitaux, car il fallait en soigner d'autres. Et ces blessés ont besoin de soins. Une blessure mal soignée comporte des risques de gangrène, et donc d'amputation, donc il faut agir maintenant. C'est ce que va faire par exemple Handicap International.

Handicap International a 70 personnes sur place, dans les hôpitaux, mais aussi des équipes mobiles, pour aller à la rencontre de ces blessés, les équiper en cas de besoin, avec des attelles, des béquilles ou des fauteuils roulants, et organiser leur rééducation, avec des ergothérapeutes pour faire en sorte que le handicap ne s'installe pas à long terme. Pour l'instant, l'ONG est présente à Katmandou, mais comme toutes les ONG sur place, elle cherche maintenant à atteindre les zones isolées.

Les secours peinent à atteindre les zones montagneuses

L'épicentre du séisme se situe à 70 km de Katmandou, en pleine zone montagneuse. Le coeur du séisme est situé dans le district de Gorkha, au nord-est de la capitale. La plupart des ONG essaient d'atteindre les régions isolées. C'est le cas par exemple de Médecins sans frontières, qui a survolé la région en hélicoptère et a tourné des images. Des villages entiers ont été anéantis. Sur les 65 survolés, 45 ont été détruits. La montagne s'est littéralement renversée sur les villages. Dans ces zones isolées, l'aide médicale est réduite. Médecins sans frontières est donc en train d'installer un hôpital gonflable qui sera opérationnel très bientôt. L'hôpital va pouvoir soigner les plaies infectées, les fractures, faire des reprises chirurgicales... Il va rester sur place un moment, probablement trois ou quatre mois. Et l'avantage de cette structure, c'est qu'elle est sécurisée en cas de répliques du séisme.

Médecins du monde est également présente dans les montagnes. Dès le départ, l'ONG s'est rendue compte que les besoins étaient finalement peu nombreux à Katmandou, et s'est rendu de l'autre côté de Katmandou, au nord-ouest. Gérard Pascal, un chirurgien qui était sur place, connaît très bien ce genre de catastrophes sur lesquelles il intervient presque à chaque fois. Il n'avait jamais vu un aussi grand nombre de personnes à la rue et totalement coupées du monde. Ce sont des centaines de milliers de personnes qu'il faut soigner, mais qui ont surtout faim, soif, et froid, et qui ont besoin d'aide.

Quel avenir pour la population népalaise ?

Sans être pessimiste, l'avenir ne s'annonce pas très bon. Dans un avenir proche, la mousson risque de compliquer les choses. La saison des pluies s'étale de juin à septembre, et semble un peu en avance puisqu'il pleut déjà beaucoup. Cela va évidemment compliquer encore un peu plus le quotidien des habitants qui vivent sous les tentes, avec un risque d'épidémies élevé. Le choléra notamment. Mais au moins les Népalais le connaissent et savent l'affronter, puisque la qualité de l'eau est si mauvaise que les épidémies sont récurrentes dans le pays.

Le séisme a également détruit les infrastructures qui étaient déjà très mauvaises. L'ONU classe les pays en fonction de leur "indice de développement humain", un indice qui compare la richesse du pays, l'espérance de vie, l'éducation et le niveau de vie. Et sur 187 pays, le Népal est classé… à la 157ème place. Depuis vingt ans, les choses s'amélioraient un peu : des centres de soins et des hôpitaux ont été construits, des médecins ont été formés, ce qui explique que les premiers soins ont été assurés, mais le séisme va forcément mettre un coup de frein au développement du pays, qui a besoin d'aide.