Atlas de la chirurgie : dans quelles régions opère-t-on le plus ?

Appendicite, césarienne, fracture de la hanche… La fréquence des opérations varie beaucoup d’un département à l’autre, selon un atlas publié par le ministère de la Santé. Des disparités territoriales qui favorisent les inégalités sociales.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Atlas de la chirurgie : où opère-t-on le plus dans votre région ? (Image d'illustration)
Atlas de la chirurgie : où opère-t-on le plus dans votre région ? (Image d'illustration)
Carte des fréquences des césariennes programmées en France (IRDES)
Carte des fréquences des césariennes programmées en France (IRDES)

Dis-moi où tu habites, et je te dirai comment tu seras opéré… En France, la fréquence de certaines chirurgies communes, comme l’appendicite ou la thyroïde, varie considérablement selon les régions. Un atlas, publié le 24 novembre par le ministère de la Santé, met en lumière ces inégalités territoriales. C’est une première du genre en France. Entre l'Ariège et la Savoie, la fréquence des opérations de tumeurs bénignes de la prostate varie, par exemple, du simple au double.

Élaboré par l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), il passe en revue onze opérations chirurgicales fréquentes [1]. L'objectif: "évoluer vers des pratiques plus homogènes" et permettre aux patients "d'opérer des choix éclairés" expliquent le ministère de la Santé et l'Assurance maladie.

L’opération du canal carpien : reflet des disparités

L'opération qui enregistre le plus gros écart est celle du syndrome du canal carpien. Cette affection douloureuse est due à la compression d'un nerf au niveau du poignet.

En 2014, 143.744 hospitalisations ont eu lieu pour cette chirurgie, soit un taux national de 220 pour 100.000 habitants. Mais ce taux varie de 66 pour 100.000 habitants dans le département de la Réunion à 386 dans celui de la Meuse, soit près de six fois plus ! Et tous les patients ne sont pas pris en charge de la même manière. « Seul un quart des patients opérés a bénéficié d’infiltrations de corticoïdes ou d’attelle préalable » indiquent les chercheurs.

Fréquence des opérations du syndrome du canal carpien (IRDES)

Appendicite, prothèse de la hanche, thyroïde…

Concernant la chirurgie de l'appendicite, une opération dont le nombre a fortement diminué depuis les années 1980, on y recourt en moyenne 4 fois plus dans la Nièvre qu'en Martinique. Des fortes différences apparaissent également pour la pose d'une prothèse du genou, avec une fréquence 3,5 fois plus élevée dans les Vosges qu'en Guyane.

Pour la chirurgie de la tumeur bénigne de la prostate, le taux est de seulement 145 pour 100.000 habitants dans l'Ariège mais grimpe à 323 en Savoie. Enfin, Entre l'Indre et le Nord, la fréquence des opérations de la thyroïde varie du simple au double. Les autres chirurgies examinées sont la chirurgie de l'obésité, l'ablation des amygdales, celle de la vésicule biliaire et celle de l'utérus, ainsi que l'opération de la thyroïde et celle de la fracture de la hanche.

Fréquence des chirurgies des fractures de la hanche en France (IRDES)

Prochaine étape : comprendre les causes de ces inégalités

L’exercice est pour le moment simplement descriptif. Si les auteurs soulignent qu'il faudra analyser plus précisément ces résultats pour en comprendre les causes, ils avancent que "l'existence de variations entre départements pour des traitements efficaces cliniquement, comme la chirurgie de la fracture de hanche, peut être une indication de l'inégalité d'accès aux soins, si les taux de recours sont associés aux conditions socio-économiques". 

Dans cette étude, la fracture de la hanche était en effet l’opération de référence car elle bénéficie d’un consensus médical. A l’inverse, l’efficacité de certaines interventions, comme l’opération des amygdales par exemple, reste discutée. "Comprendre les causes de ces variations et en vérifier la justification est indispensable pour assurer la qualité, l'efficience et l'équité des soins fournis" soulignent les auteurs.

Faire connaître les bonnes pratiques

Et si l'idée est bien de réduire les écarts, l'objectif n'est pas tant que tous les départements s'alignent sur les taux moyens constatés au niveau national, mais plutôt de généraliser les "bonnes pratiques", résume l'Assurance maladie.

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Source : Atlas des variations de pratiques médicales, IRDES, novembre 2016

[1] NB : Les calculs ont été faits en fonction du département de domicile des patients, et non celui où ils se font opérer s'il est différent. Les taux ont été corrigés pour pouvoir être comparés indépendamment des structures d'âge et de sexe de chaque département. 

 

Zoom sur la césarienne

En France, près d’une femme sur 5 donne naissance par césarienne. Et, dans la moitié des cas, c’est programmé. Les écarts régionaux de fréquence de césariennes programmées sont très élevés. Cette opération représente ainsi de 2 à plus de 20% des naissances dans certains endroits ! Ce taux grimpe à 24,7% en Haute-Corse, contre moitié moins en Guadeloupe ou dans le Jura.

Si un programme a été mis en place pour réduire ce taux, « on observe  toujours  un  taux  de  césariennes  beaucoup  plus  important  dans les maternités privées que dans les  maternités  publiques » précise par exemple l’Atlas. Cet acte, indiqué lorsque les conditions ne sont pas favorables pour un accouchement par voies naturelles, "ne peut être considéré comme une alternative « de confort » dépourvue de risque", rappellent les auteurs.