Venins : une banque de données pour trouver des médicaments

Serpents, scorpions, araignées, anémones de mer, fourmis, lézards... la plus grande banque au monde de données sur les venins, source potentielle de futurs médicaments (diabète, cardiovasculaire, obésité...), créée dans le cadre du projet européen Venomics, va devenir accessible ce mois-ci.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Il existe 150.000 à 200.000 espèces venimeuses, voire plus, représentant des dizaines de millions de molécules potentielles. Vidéo : ''Venin : quand le poison devient médicament'', sujet diffusé le 16 janvier 2014.
Il existe 150.000 à 200.000 espèces venimeuses, voire plus, représentant des dizaines de millions de molécules potentielles. Vidéo : ''Venin : quand le poison devient médicament'', sujet diffusé le 16 janvier 2014.
Monstre de Gila, dont le venin contient l'exénatide, principe actif de l'antidiabétique Byetta®.
Monstre de Gila, dont le venin contient l'exénatide, principe actif de l'antidiabétique Byetta®.
Dendroaspis polylepis, le ''mamba noir'' (cc-by-sa Bill Love/Blue Chameleon Ventures)

Au terme de quatre ans de travail, cette base de données unique deviendra accessible aux chercheurs sur Internet fin octobre, a indiqué ce 16 octobre Frédéric Ducancel (Institut des maladies émergentes et des thérapies innovantes (CEA-IMETI) à Saclay), membre du consortium Venomics.

Cette base mettra à disposition des scientifiques plus de 25.000 séquences génétiques de toxines, provenant d'échantillons de 203 espèces animales, allant de quelques grammes (comme la majorité des araignées) à plusieurs kilos comme le serpent mamba. Selon Frédéric Ducancel, 4.000 toxines (fragments de protéines, ou peptides) ont déjà pu être produites in vitro à partir des venins étudiés. Ces toxines, qui font désormais l'objet de recherches, sont stockées au CEA à Saclay.

La moitié des venins n'a ''rien de connu''

"Cet inventaire a révélé que la moitié de ce qui a été identifié dans les venins étudiés ne correspondait à rien de ce qui était connu, au plan génétique et biologique", a expliqué Frédéric Ducancel.

Dans l'histoire de la pharmacologie, il y a déjà des exemples de médicaments issus de la recherche sur les venins comme l'antidiabétique Byetta® (dont le principe actif est l'exénatide, présent dans la salive du monstre de Gila, un lézard venimeux) ou l'anti-douleur Prialt® (ziconotide, dérivé du venin d'un escargot).

Les technologies modernes (telles que la génomique, le séquençage de l’ADN à grande échelle, l'étude des protéines) ont permis d'accélérer la recherche de molécules candidates à devenir de futurs médicaments dans le domaine de l'obésité, du diabète, des allergies, de l'immunologie, des maladies cardiovasculaires, voire du cancer. Une trentaine ont déjà été repérées.

Le projet Venomics, qui a bénéficié d'un financement européen de 6 millions d'euros, associe des partenaires de cinq pays européens (Belgique, Danemark, Espagne, France et Portugal), du privé et du public. Mais les chercheurs espèrent pouvoir trouver de nouveaux financements pour poursuivre cette exploration.

Deux autres bases de données de ce type existent déjà dans le monde, l'une pour les serpents et l'autre pour les araignées.