Déserts médicaux : la ville de Sens fait appel à SOS Médecins

En vingt ans, la ville de Sens, dans l'Yonne, a perdu la moitié de ses médecins généralistes. Les habitants, notamment les personnes âgées, souffrent de cette situation. La ville est devenue ce qu'on appelle un désert médical. Mais la mairie a trouvé une solution inédite : faire appel à SOS Médecins pour remplacer les médecins traitants.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Pour commencer sa tournée, le Dr Jean-Luc Dinet n'est pas aussi pressé que d'ordinaire. Ce praticien de SOS Médecins devient médecin traitant pour la journée. Sa mission : rendre visite à des retraités qui n'ont plus accès aux soins. Comme cinq autres médecins, il participe à ce dispositif expérimenté depuis plus d'un mois à Sens, une ville touchée par la désertification médicale, et apprécie sa nouvelle mission : "On va prendre en charge des personnes sur une période limitée, six mois, un an, le temps qu’elles retrouvent un médecin traitant. Je suis satisfait oui, c'est une certaine fierté d’apporter quelque chose à des gens en rupture médico-sociale".

Une mesure qui s'adresse aux retraités

La première patiente du Dr Dinet a 73 ans. Maria de Kinderen n'a plus de médecin traitant. Son médecin est en effet parti à la retraite il y a deux ans. Depuis, elle n'a pas trouvé de remplaçant. Le Dr Dinet doit donc reprendre tout son dossier médical pour assurer son suivi. Problème : elle ne l'a pas récupéré chez son médecin. La retraitée a simplement les doubles de ses derniers examens. Le médecin doit s'adapter et constituer un nouveau dossier médical partagé.

"Je vais vous examiner. On va se mettre sur le canapé et vous allez enlever le gilet". L’examen médical a lieu au milieu de son salon. Il y a deux semaines, Maria a fait une chute. Elle est subitement tombée dans la rue et s'est blessée au poignet et à la hanche, mais elle n'a pas consulté. En poursuivant poursuivant l'examen clinique, le Dr Dinet se rend vite compte qu'après deux ans sans suivi, le bilan n'est pas très bon.

Améliorer le suivi médical

"Je me retrouve avec une patiente qui a une  hypercholestérolémie, un bilan de malaise, une arthrose et un problème respiratoire. Dans ce cas-là, on ne fait pas que reprendre un patient qui a un médecin ? Tout est à reprendre", explique le Dr Dinet. La visite du médecin a rassuré Maria, elle espère se soigner. Le prix de la consultation à domicile est le même que pour un généraliste en secteur 1. Un autre médecin reviendra dans trois mois.

Une dizaine de patients bénéficient pour l'instant de ces médecins traitant en remplacement. Au Centre communal d'action social (CCAS) de Sens, l'objectif est simple : identifier les futurs bénéficiaires. Les critères sont précis : il faut habiter la commune, être retraité et avoir plus de 60 ans, ne pas avoir de médecin traitant et souffrir d'une pathologie chronique.

Identifier les personnes isolées

La difficulté de ce dispositif est d'identifier les personnes isolées et de leur faire passer le message. Yves Colin, le directeur du CCAS de Sens, pense donc faire appel à des relais : "l’objectif est de toucher les aidants qui viennent à domicile, c'est-à-dire le voisin, mais aussi l'infirmière, l'aide-soignant à domicile, le pharmacien,... pour qu'ils aient les informations que le service existe et qu'ils peuvent nous signaler les personnes."

Cette expérimentation devrait permettre de suivre jusqu'à 120 patients. Une solution inédite pour faire face à la désertification médicale. Marie-Louise Fort, députée-Maire de Sens, explique : "c'est zéro euro pour la collectivité et cela évite de devoir précipiter les personnes âgées dans des structures d'accueil où elles ne veulent pas forcément aller. Elles peuvent ainsi rester à domicile."

A Sens, sur les vingt-six généralistes en exercice, la moitié devrait partir à la retraite dans les dix ans à venir. Alors la ville propose aussi une prime d’installation de 15.000 euros pour attirer de nouveaux médecins.