Confinement : qu'ont mangé les Français ?

Durant le confinement, les Français ont changé leurs habitudes alimentaires. Ils ont cuisiné maison, mais certaines mauvaises habitudes alimentaires comme le grignotage sont aussi apparues.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le

Le confinement imposé par l’épidémie de Covid-19 a eu des conséquences sur les habitudes alimentaires des Français. C’est ce que dévoile une étude de Santé Publique France -basée un sondage mené en deux fois auprès de 2 000 personnes- puis celle, moins connue, conduite par Yuna Chiffoleau, agronome et sociologue à l’INRAE (ex-INRA).
Avec ses collègues de sept autres pays confinés (Italie, Pologne, Brésil, Argentine, USA etc.), elle étudie ce que les consommateurs lui décrivent de leurs courses et de leurs habitudes alimentaires. Ce programme s'appelle "Manger au temps du coronavirus", c'est une véritable mine d’informations qui concerne 600 personnes en France.
Le "matériel" est riche, les premiers résultats sont jugés solides, car ils sont également corrélés avec ceux de l’analyse des ventes en rayons. 

Comment les Français ont-ils mangé au temps du coronavirus ? 

  • Ce qui ressort de cette étude est l’entraide, la solidarité spontanée, instinctive. Les Français ont fait les courses pour les voisins, la famille, et ils ont donné, aussi, sans mégoter.
  • Ils ont aussi acheté moins de produits frais dans les hypers et les grands supermarchés… parce qu'ils ont eu peur d’être contaminés. Ils ont mangé plus local et ont privilégié les petits magasins et les "circuits courts", pour trois raisons : moins de risques de contamination, un soutien à l‘économie locale et la découverte par beaucoup que les "petits" sont modernes car ils ont su s’organiser très vite.
  • Tout cela a profité au bio, car statistiquement, il est plus présent dans les petites surfaces et en local, là où il est produit .
  • En supermarchés, ils ont aussi massivement acheté dans un premier temps les produits qui combattaient leur peur instinctive de mourir de faim, à savoir les pâtes, le riz, les céréales etc. (le papier toilette et la litière pour chat, pour des raisons qui nous échappent) puis les produits (farine, œufs, levure) pour faire du pain ou des gâteaux avec les enfants… 
  • Des produits anti-anxiété ont beaucoup été grignotés : 22% des personnes interrogées déclarent manger entre les repas beaucoup plus qu’avant. 
  • Enfin, dernière tendance : les Français ont planté, jardiné, cueilli. Les jardineries ont été dévalisées en terreaux et en semis, surtout pour des courgettes et des tomates. 

Plus de frais, plus de bio, plus de local... ce n’est pas vrai pour tout le monde...  

Tout cela est bon pour la santé, l’environnement, le monde paysan, mais : 

  • Premier bémol, Santé publique France nous apprend que 17% des Français mangeraient moins équilibré qu’avant. La faute au grignotage et à la moindre disponibilité de certains produits, signalée par 57% des Français.
  • Second bémol, l’argent : un quart des Français aurait fait attention à son budget alimentaire. En réalité, la situation a accentué encore un peu plus la crise sociale. Si le confinement a permis à beaucoup de retrouver l’essence-même de l’alimentation - un producteur, un marchand, un légume, une viande, faire à manger à la maison etc.- il a aussi précipité beaucoup d’autres dans l’insécurité alimentaire. 

Les cantines qui assuraient au moins un repas équilibré par jour aux enfants ont été fermées. Les associations et les services sociaux de beaucoup de villes avaient prévenu que cela aurait de lourdes conséquences pour les plus précaires, c’est ce qui s’est passé. 

Idem pour les marchés qui permettent à beaucoup d’acheter à bas prix les invendus à la fermeture. Ils ont été fermés, avec d'autres conséquences tragique pour les plus démunis. 

L'aide alimentaire a-t-elle suivie ? 

C’est une heureuse surprise, elle a plutôt bien été présente. Il y a eu une très mauvaise coordination au début, entre les services administratifs, les préfectures et les associations, personne ne savait plus qui allait faire quoi, mais les choses se sont assez rapidement arrangées. 

Magali Ramel, qui fait sa thèse sur la question, a observé l’étonnante réactivité des collectivités.  

  • Le département de la Meurthe-et-Moselle a reversé directement aux familles dans le besoin ce qu’il versait avant aux cantines, et il a organisé la livraison de repas pour les collégiens en difficulté.
  • Le département de la Manche, celui du Gard et la région Ile-de-France ont débloqué beaucoup d’argent pour l'achat de denrées auprès de producteurs et transormateurs locaux, pour le compte des associations.
  • En Seine-Saint-Denis, l’ouverture des cuisines centrales a permis de distribuer des repas cuisinés, équilibrés aux personnes bénéficiant de l'aide alimentaire. 

Une volonté politique 

Tout cela est plutôt rassurant et cela prouve que lorsqu’il y a une volonté politique forte qui coordonne et outrepasse les routines administratives, non seulement on trouve de la nourriture, mais on en trouve pour les plus pauvres. 

Si notre pays a à peu près bien résisté, c’est en partie grâce à la solidarité de chacun, à la diversité et à la dispersion de ses agriculteurs et commerçants. Il n’y a pas, en France, de "désert alimentaire", contrairement aux États-Unis. Il reste à espérer que cela perdure.