Quels sont les effets de l'ayahusca, plante d'Amazonie qui soignerait la dépression ?

L'ayahuasca est une plante traditionnellement ingérée dans un cadre chamanique. Aujourd'hui, elle intéresse les scientifiques qui y voient un médicament contre certaines troubles mentaux.

Setti Dali
Rédigé le
Ayahuasca : une exposition hallucinante
Ayahuasca : une exposition hallucinante  —  Le Mag de la Santé - France 5

D’un monde à l’autre, c'est la promesse du musée du Quai Branly qui vous propulse au cœur de l’Amazonie à la rencontre des Shipibo-Konibo. Cette tribu péruvienne est connue dans le monde entier pour l’usage d'une plante aux airs de serpent et aux pouvoirs hallucinogènes : l'ayahuasca.

Cette plante est administrée par le chaman sous forme de potion et agit en quelques minutes. D’abord les nausées, puis des visions très puissantes, qui permettent au guérisseur de voir l’invisible, notamment le mal dont souffre ses patients.

Des visions psychédéliques

"L’une des fonctions de la prise d'ayahuasca par le guérisseur, c'est l'opération diagnostic. Il boit l'ayahuasca pour identifier l’origine de la souffrance du malade et ensuite proposer la thérapie", explique David Dupuis, anthropologue et commissaire de l’exposition "Visions chamaniques" au musée du Quai Branly.

Sous l’effet de la drogue, les visions apparaissent : d'abord des motifs géométriques et obsédants qui sont devenus un art à part entière. D'autres images, très colorées, peuplées d’esprits, d’animaux, d’être mythologiques, parfois même d’extraterrestres surviennent ensuite.

Ces visions, induites par l’ayahuasca ont donné naissance à un art visionnaire et psychédélique.

Une plante classée comme stupéfiant en France

"Il y a également l'idée que l'ayahuasca donne accès, dans le cas du chamanisme, aux esprits, animaux et végétaux, qui peuplent la forêt, d’où aussi la récurrence des représentations de ces végétaux et de ces animaux. Il y a un courant artistique né de la globalisation de l'usage d’une plante médicinale, ce qui est assez unique", précise David Dupuis.

Si en Amazonie, l'ayahuasca est un outil de guérison, en France, la plante est classée comme stupéfiant. Elle contient en réalité de la Diméthyltryptamine, la DMT. Comme le LSD, ce sont des substances qui provoquent une augmentation du rythme cardiaque, de la pression artérielle et surtout de puissantes hallucinations.

Une activation des récepteurs de la sérotonine

"Elle agit en pénétrant dans le cerveau, en activant des récepteurs qui se trouvent dans certaines régions du cerveau, ces récepteurs sont ceux de la sérotonine. Une fois que ces aires cérébrales assez spécifiques sont activées, elles sont connectées entre elles et provoquent cet état de transe. On appelle cela un état modifié de conscience que ressent le chaman. Ce que le chaman appelle l’esprit de l'ayahuasca ou l'esprit des plantes, ce sont les propriétés pharmacologiques", précise le Pr Stéphane Laurent, professeur émérite de pharmacologie à l'université Paris-Cité.

Avec son fils, apprenti chaman, ce médecin a co-écrit un livre dans lequel ils ont exploré ensemble les études cliniques sur l’ayahuasca.

L'ayahuasca plus efficace que les antidépresseurs ?

Elle réduirait l’anxiété, améliorerait l’humeur, augmenterait la concentration et la créativité. Certaines études ont même démontré son efficacité contre les addictions, les douleurs chroniques ou les dépressions sévères.

"On se rend compte que les
 antidépresseurs n'agissent, dans le meilleur des cas, qu'au bout de plusieurs semaines. Alors que l’ayahuasca agit tout de suite et de manière durable. L'ayahuasca entraîne des visions. Si on arrivait à trouver une molécule qui pouvait entraîner des effets anti-dépresseurs sans entraîner de visions, qui sont quand même plutôt difficiles à vivre, ce serait formidable", poursuit le Pr Stéphane Laurent.

L'ayahuasca n’a pas fini de révéler ses mystères. Tout comme la famille des substances psychédéliques qui font l’objet de nombreux essais cliniques dans le monde et en France.

"Visions chamaniques : arts de l’Ayahuasca en Amazonie péruvienne", au musée du quai Branly à Paris, jusqu’au 26 mai 2024 .