L'espoir d'un traitement pour soulager la fatigue chronique

Ses origines restent mystérieuses, pourtant le syndrome de fatigue chronique est un mal bel et bien réel, pour lequel il n'existe aucun traitement curatif. Des chercheurs norvégiens viennent de mettre en lumière une molécule qui pourrait soulager significativement les symptômes : un médicament normalement utilisé pour traiter les lymphomes.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Le syndrome de fatigue chronique pourrait toucher 150.000 Français (Image d'illustration)
Le syndrome de fatigue chronique pourrait toucher 150.000 Français (Image d'illustration)

Epuisement intense, douleurs musculaires, problèmes de concentration… Le quotidien des personnes atteintes de fatigue chronique est une véritable souffrance. Jusqu'alors aucun traitement n'est disponible pour soulager leurs symptômes et améliorer leur cadre de vie. Une première piste de traitement a été apportée par une étude norvégienne, publiée le 1er juillet 2015, dans la revue PlosOne.

Pour y arriver, les chercheurs sont partis d'une découverte totalement fortuite. En 2004, une personne souffrant du syndrome de fatigue chronique a également été traitée pour un lymphome. Au bout de quelques mois, elle a vu complément disparaître ses symptômes de fatigue chronique. Partant de cette observation, l'équipe de recherche norvégienne a choisi de tester ce traitement anti-cancer, le rituximab, également prescrit pour l'arthrite rhumatoïde, sur des personnes atteintes de fatigue chronique. Et la méthode a semblé fonctionner.

Le rituximab est une molécule qui fait baisser le taux de cellules immunitaires, les lymphocytes B, producteurs d'anticorps. Les chercheurs ont posé deux perfusions de ce médicament à 29 personnes souffrant de fatigue chronique, à deux semaines d'écart. Après quatre à six mois, 18 des 29 personnes ont vu leurs symptômes nettement diminuer, soit 62%. Pour 11 d'entre eux, les chercheurs parlent même de rémission… Trois ans plus tard, ces derniers avaient retrouvé un confort de vie normal.

La piste des anticorps en question

Le rituximab détruit une partie des anticorps. Selon les chercheurs, ce serait donc eux les responsables du syndrome de fatigue chronique, du moins pour une partie des malades. Suite à une infection, les anticorps se multiplient dans l'organisme, et peuvent parfois se retourner contre les propres cellules du corps. En circulant dans le sang, les anticorps empêcheraient l'oxygène de circuler correctement et c'est ce manque d'oxygène qui induirait la fatigue. Seulement pour l'instant, ces allégations restent de simples hypothèses.

D'autre part, cette étude n'a pas l'avantage de proposer un groupe témoin, qui aurait prit un placebo au lieu du rituximab, pour vérifier l'efficacité seule de la molécule. Cependant, en 2011, un essai du même type avec un groupe témoin cette fois-ci, avait donné quasiment les mêmes résultats : les deux tiers des patients traités par rituximab avait été soulagés de leurs symptômes.

Quels effets indésirables ?

Utiliser un traitement pour une maladie grave comme le cancer peut s'avérer problématique, car il réduit l'immunité naturelle du corps. Parmi les personnes recrutées, deux ont développé une réaction allergique, deux autres une infection des voies respiratoires et la dernière un purpura thrombopénique (une baisse extrême du taux de plaquettes sanguines). Un nouvel essai devrait démarrer prochainement, expliquent les chercheurs, incluant cette fois-ci 150 personnes.

Le syndrome de fatigue chronique a longtemps été considéré comme une maladie psychologique, apparentée notamment à une dépression. Pourtant les souffrances sont bien présentes : épuisement après de simples efforts comme faire ses courses, douleurs et brûlures dans les muscles, problèmes de concentration et de mémoire ou encore un sommeil qui n'est pas réparateur.

Des pistes explicatives commencent à s'orienter de plus ne plus vers une anomalie immunitaire, dans l'espoir de décrypter les origines de la fatigue chronique. 150.000 personnes (1) pourraient être touchées par ce syndrome en France, dont un tiers restera malade toute sa vie.

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(1) Selon l'Association Française du Syndrome de Fatigue Chronique

Source : B-Lymphocyte Depletion in Myalgic Encephalopathy/ Chronic Fatigue Syndrome. An Open-Label Phase II Study with Rituximab Maintenance Treatment. O. Fluge et al. PlosOne, juillet 2015. DOI: 10.1371/journal.pone.0129898