Cannabis : comment éviter la dépendance ?

Faut-il ou non dépénaliser le cannabis ? Le débat fait l'actualité. Une des questions centrales est la possibilité d'améliorer la prévention auprès des adolescents qui testent cette drogue de plus en plus tôt. Un enjeu majeur puisque le risque d'addiction au cannabis est trop souvent sous-estimé. Il est pourtant tout aussi réel que ses effets toxiques sur un cerveau très jeune.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Si le cannabis est si dangereux, c'est qu'il n'est pas vraiment identifié comme une drogue par les jeunes qui le consomment de plus en plus tôt. Pourtant, il existe un véritable risque d'addiction. "Environ 15% des sujets qui essaient le cannabis deviennent dépendants et en consomment tous les jours, plusieurs fois par jour. Et c'est une des substances les plus désocialisantes à cause de l'état de démotivation générale et des effets négatifs sur la mémoire que le cannabis provoque. Il provoque un échec scolaire dix fois supérieur par rapport à des sujets qui ne fument pas de cannabis. Et les niveaux de chômage sont trois fois supérieurs à ceux des sujets qui ne fument pas", explique le Pr Pier Vincenzo Piazza, directeur du Neurocentre Magendie.

Ces effets majeurs du cannabis sur le fonctionnement du cerveau sont liés à la structure même d'une de ses molécules actives : le THC, très proche d'une molécule naturelle (anandamide). "Le THC va agir sur les récepteurs sur lesquels agit l'anandamide. Et comme ces récepteurs sont présents partout dans le cerveau, quand on consomme du cannabis, le cannabis agit partout sur le cerveau", précise le Dr Martine Cador, de l'Institut des neurosciences cognitives et intégratives d'Aquitaine.

Parmi les circuits activés par le cannabis, il y a le fameux système de la récompense autour de la dopamine. "Le cannabis agit en stimulant, comme toutes les autres drogues, la libération de dopamine. Et lorsqu'on consomme de plus en plus de cannabis, la stimulation des récepteurs est massive, continue et entraîne une déstabilisation du réseau neuronal. Et c'est cette déstabilisation du réseau qui peut expliquer le processus addictif", c'est-à-dire un besoin pathologique de consommer des doses de plus en plus élevées sans en évaluer les conséquences.

Et c'est en étudiant expérimentalement l'effet sur le cerveau de doses extrêmes de cannabis qu'un mécanisme de défense étonnant a été découvert  comme le confie Le Pr Piazza : "Nous avons découvert que quand il y a des doses très importantes de THC, donc beaucoup de cannabis, le cerveau produit une hormone (la pregnenolone) qui va se lier sur les récepteurs et va bloquer un certain nombre d'effets, et notamment tous les effets toxiques du cannabis".

L'équipe a donc réussi à synthétiser une molécule dérivée de cette hormone pour des tests précliniques chez l'animal : "Si vous traitez les singes avec ces médicaments, leur envie de prendre de façon spontanée du cannabis va diminuer de façon très importante. Et ce médicament est aussi capable de bloquer l'effet du cannabis sur la prise alimentaire ou de bloquer les effets du cannabis sur la mémoire. Donc le cannabis ne va plus induire une perte de mémoire si vous avez pris le traitement avant", indique le Pr Piazza. Les premiers essais chez l'homme pourraient avoir lieu dans moins d'un an.