Jeunes et alcool : le rôle essentiel des parents ?

J'ai deux ados : quels sont les signes devant lesquels on peut s'inquiéter ?

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Les réponses avec le Dr Michel Reynaud, psychiatre addictologue :

"C'est déjà bien que cette maman s'inquiète. On peut être utile comme parent quand on a une préoccupation marquée, qu'on n'est pas trop laxiste… Quand on a des adolescents, il faut pouvoir supporter d'être contraignant, tout en rappelant qu'on contraint parce qu'on aime. L'éducation, c'est permettre de prendre le maximum de risques en apprenant à prendre le maximum de précautions.

"Cette maman peut dire que boire de l'alcool est agréable, c'est festif, on se sent amoureux, on est proche des autres, on rigole… et en même temps boire de l'alcool est dangereux. Il n'y a aucun doute, l'alcool provoque des accidents de la route, il est à l'origine des violences, des relations sexuelles à problème, c'est l'alcool qui ultérieurement entraînera des dépendances et entre temps altérera le fonctionnement intellectuel, social et affectif.

"Il existe tout de même un éventail de complications liées à l'alcool. Cette maman doit donc dire à ses enfants qu'elle est inquiète, elle doit regarder la fréquence avec laquelle cela se produit. Les enfants vont essayer de ramener de l'alcool chez eux, les parents en trouveront dans les frigos… donc il faut essayer de limiter la casse qui de toute façon est très socialement soutenue et très soutenue par un marketing ciblé sur les jeunes, ciblé sur les femmes.

"En tant que parent, il faut savoir que l'on est dans ce contexte addictogène et dangereux et donc il faut essayer d'en préserver les enfants. Et pour les en préserver, il faut pouvoir leur en parler, il faut pouvoir leur dire que ce n'est pas anodin d'avoir de la vodka à la maison, ce n'est pas anodin de dire qu'à 14 ans il n'y a pas une fête sans alcool… Non, l'alcool reste dangereux. On peut comprendre que boire de l'alcool est très agréable mais s'ils se mettent en danger régulièrement, le rôle du parent est d'essayer de lui dire que ce n'est plus possible, qu'il faut se calmer… Beaucoup boivent, beaucoup boiront trop… mais un grand nombre reviendra à la normale ensuite. À 30 ans, on arrête le cannabis et les cuites car on est marié, on a des enfants…

"C'est plutôt les gros binge drinkers (cuites répétées) qui s'abîment le cerveau et qui deviendront dépendants. Mais il peut n'y avoir qu'une cuite une fois et avoir un accident de voiture ou avoir une violence ou découvrir des choses au fond de soi qu'on n'aurait pas envie de voir apparaître.

"C'est très bien de s'inquiéter parce que l'alcool est dangereux. L'alcool est beaucoup plus dangereux que le cannabis. On peut s'inquiéter de façon légitime si on trouve du cannabis chez son enfant et là aussi il faut en parler, il faut essayer de voir la gravité. Mais même si socialement il est apparemment normal de boire et de se cuiter, il faut que les parents aient en tête que cela peut être dangereux dans l'immédiat, à moyen terme et à long terme. Ça ne se fait pas en un jour donc il faut maintenir la pression et ce n'est pas parce que vos enfants vous disent que vous êtes un "vieux con", que tout le monde boit, que vous n'avez jamais su prendre du plaisir…  qu'il ne faut pas rappeler qu'on aime et qu'on ne veut pas qu'ils se fassent du mal."