Sclérose en plaques : un espoir de traitement dans les formes agressives ?

Une équipe de médecins canadiens a testé sur 24 patients atteints de sclérose en plaques "agressive" (SEP) une thérapeutique lourde. Les résultats, publiés dans The Lancet, montrent une absence d'évolution de la maladie et d'apparition de nouvelles lésions pour certains patients. Ces résultats sont à prendre avec prudence car l'étude a été menée sur un très petit nombre de malades atteints d'une forme particulière de SEP.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Chez les patients atteints de sclérose en plaques, le système immunitaire dysfonctionne. Les cellules de défense de l'organisme contre les infections ou agressions extérieures se retournent contre le corps et attaquent le cerveau et la moelle épinière, plus précisément la myéline, la gaine qui entoure le nerf. Les lésions engendrent un handicap moteur, sensitif et neurologique qui peut devenir irréversible. Cette maladie évolue par poussées (alternance de phases de calme et d'activité). Actuellement, les traitements permettent de réduire ces poussées mais n'empêchent pas la progression de la maladie.

Une équipe canadienne, dans l'espoir d'endiguer la progression de la maladie, expérimente depuis près de quinze ans, dans un essai clinique de phase 2, une technique très agressive visant à détruire le système immunitaire déficient avec une chimiothérapie lourde pour ensuite le régénérer grâce à une autogreffe de moelle osseuse.

Pour cela, les chercheurs procèdent d'abord à un prélèvement des cellules de la moelle osseuse du patient. Ces cellules immatures, capables de se différencier en cellules immunitaires, sont conservées. Les patients sont ensuite soumis à une chimiothérapie extrêmement agressive qui supprime toutes les défenses immunitaires existantes. Puis, les cellules de la moelle osseuse sont réinjectées dans le sang du patient et vont aller recoloniser la moelle et être à l'origine de cellules d'une nouvelle immunité.

Un protocole lourd réservé à des patients atteints d'une forme agressive

Ce lourd protocole mené sur 24 patients présente de gros risques car les médicaments utilisés sont toxiques et suppriment totalement les défenses immunitaires.

"C'est une procédure qui nécessite plusieurs semaines d'hospitalisation et qui ne va pas sans effets secondaires. Elle peut engendrer des accidents toxiques ou infectieux mortels. Un patient est d'ailleurs décédé de complications hépatiques et infectieuses pendant l'étude", commente le Pr Bruno Stankoff, neurologue à l'hôpital Saint-Antoine, Paris.

Le type de patients sélectionnés pour cette étude est donc très particulier. Il s'agit de malades qui présentent une forme très agressive et très inflammatoire de la maladie ayant accumulé de nombreuses poussées sur une courte période entraînant de nombreuses lésions neurologiques et aboutissant à un handicap considérable.

Des résultats à interpréter avec précaution

Cette étude est faite sur un nombre restreint de sujets. Sur les 24 patients qui ont reçu le traitement expérimental, seuls 21 ont continué à être suivis pendant trois ans et 13 pendant treize ans.

Près de 70% des patients suivis sur une durée de trois ans n'ont pas eu de nouvelles manifestations de sclérose en plaques*. Ceux qui ont continué à être suivis sur treize ans n'ont pas eu de poussées, ni d'apparition de nouvelles lésions neurologiques. 

"Il reste tout de même un tiers des sujets chez qui la progression a repris. Ce sont ceux qui avaient une forme de la maladie la moins inflammatoire et une forme plus progressive de la maladie", relève le Pr Stankoff. "Cela suggère que ce type de procédure thérapeutique ne peut être utilisé que sur une tranche limitée des patients avec une forme de SEP très inflammatoire, très agressive mais pas dans les formes tardives ou progressives de la maladie qui s'installent insidieusement avec moins de composante inflammatoire".

Aujourd'hui le traitement reste expérimental et rien ne dit donc que l'indication de cette procédure pourra être étendue à d'autres phases ou formes de la maladie pour prévenir l'apparition des lésions. "Il faut rester très prudent", conclut le Pr Stankoff.

*Ce résultat serait de 45% dans la population générale au vu de la petitesse de l'échantillon.

Source : Immunoablation and autologous haemopoietic stem-cell transplantation for aggressive multiple sclerosis: a multicentre single-group phase 2 trial, DOI: http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(16)30169-6