Alzheimer : vers un diagnostic plus fiable et plus précoce

Une équipe internationale de chercheurs en neurologie propose une approche simplifiée du diagnostic de la maladie d'Alzheimer.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

La maladie d'Alzheimer a beau être la plus fréquente des démences séniles, beaucoup d'incertitudes demeurent sur ses origines et ses mécanismes, rendant difficile son diagnostic. Aujourd'hui encore, un tiers des malades auraient un diagnostic erroné de leur maladie selon les chiffres de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Une situation difficile à accepter pour les patients et leur entourage alors que plus de 750.000 personnes sont touchées par la maladie d'Alzheimer en France et que leur nombre pourrait dépasser le million de cas d'ici 2030.

La maladie d'Alzheimer est provoquée par une perte de neurones qui entraîne l'altération progressive, mais irréversible, de la mémoire. Or, si l'on sait aujourd'hui que l'accumulation de certaines protéines cérébrales est à l'origine des lésions, les origines et mécanismes de cette neuro-dégénérescence ne sont encore que partiellement connus. Quant aux symptômes - troubles de la mémoire et du comportement, difficultés à s'orienter dans l'espace et le temps, perte d'autonomie - ils ne sont pas toujours spécifiques.

L'avènement des biomarqueurs

En 2007, un groupe international de neurologues, coordonné par le professeur en neurologie Bruno Dubois de l'Inserm, introduit de nouveaux critères diagnostics : les biomarqueurs. Ainsi la protéine bêta amyloïde et la protéine tau sont des constituants majeurs des lésions cérébrales caractéristiques de la maladie d'Alzheimer, véritables signatures de la pathologie.

On découvre alors que selon ces nouveaux critères, beaucoup de patients sont mal diagnostiqués. Une errance diagnostique doublement dommageable. "Au-delà de la précision diagnostique que nous devons au patient et à son entourage, il faut rappeler que la maladie d'Alzheimer n'est pas la seule cause de déclin cognitif avec l'âge", explique le Dr Vincent Deramecourt, neurologue au Centre Mémoire de Ressources et de Recherche (CMRR) du CHRU de Lille. Ainsi une démence vasculaire ou une maladie à corps de Lewy ne relèvent pas de la même prise en charge qu'une démence due à Alzheimer".  Mais elle est également dommageable pour la recherche car la mauvaise sélection des patients pour participer aux études peut avoir un impact sur leur résultat et donc sur l'absence d'efficacité des traitements testés.

Ponction et neuro-imagerie

Le développement des méthodes de diagnostic présente donc un enjeu de taille que renforce encore l'étude publiée en juin 2014 dans la prestigieuse revue britannique The Lancet Neurology. Au terme de neuf ans de travaux, l'équipe internationale coordonnée par le professeur Dubois y propose un diagnostic simplifié, intégrant les critères les plus spécifiques de la maladie.

Selon l'étude, pour être fiable, le diagnostic doit reposer sur la mise en évidence d'un profil clinique qui peut correspondre à trois situations distinctes. Chacun des profils doit, dans un second temps, être confirmé par au moins un marqueur biologique, car comme le rappelle le Dr Marie Sarazin, neurologue, "aujourd'hui, on ne parle pas de diagnostic en l'absence d'argument biologique. Un diagnostic qui ne repose que sur l'observation clinique demeure simplement probabiliste". Selon l'étude du Lancet Neurology, les marqueurs biologiques peuvent être mis en évidence soit :

- par une ponction dans le liquide céphalorachidien afin de mettre en lumière des teneurs anormales de protéines cérébrales (en baisse pour la protéine bêta amyloïde et en hausse pour la protéine tau) ;
- dans le cerveau par neuro-imagerie grâce à une TEP (tomographie par émission de positons) qui permet de visualiser les activités des tissus.

L'examen clinique reste indispensable

"Les biomarqueurs du liquide céphalorachidien ou en imagerie moléculaire par TEP ont désormais une place majeure dans l'amélioration du diagnostic de maladie d'Alzheimer, car ils permettent d'authentifier la présence des lésions de la maladie dans le cerveau des sujets", analyse le Dr Deramecourt. "En particulier, si les biomarqueurs sont normaux ou négatifs, cela signe clairement l'absence de maladie. En revanche, il faut être prudent face à un examen positif, notamment chez la personne âgée, où il peut y avoir un chevauchement entre des altérations cérébrales liées à l'âge et le développement d'une véritable maladie d'Alzheimer évolutive. Si les biomarqueurs sont positifs alors que le sujet n'a pas de déclin cognitif documenté, cela signifie simplement qu'il est à risque de développer la maladie. En aucun cas, on ne pose le diagnostic de maladie d'Alzheimer sur la seule base des biomarqueurs. L'évaluation clinique spécialisée demeure donc essentielle au diagnostic."

Onéreuse et invasive, l'utilisation généralisée des biomarqueurs rencontre encore aujourd'hui des limites légales. L'utilisation du TEP dans le diagnostic de la maladie d'Alzheimer ne bénéficiant pas à l'heure actuelle d'une autorisation de mise sur le marché en France, son utilisation demeure pour l'heure limitée à la recherche sur la maladie.

Etude de référence : Advancing research diagnostic criteria for Alzheimer's disease: the IWG-2 criteria, The Lancet Neurology, Volume 13, Issue 6, Pages 614 - 629, June 2014, doi:10.1016/S1474-4422(14)70090-0


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