Autisme : la méthode des "3i" en question

En France, 430.000 personnes sont atteintes d’autisme, dont un quart sont des enfants. Ce trouble débute généralement avant l’âge de 3 ans et affecte les fonctions cérébrales de l'enfant. Certains parents se tournent vers une nouvelle technique basée sur le jeu : la méthode de stimulation, dite des "3i", pour "intensive, individuelle et interactive". Mais pour l’instant, elle n’est pas reconnue par les médecins.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

C'est une nouvelle journée de jeu qui commence pour Owen, 6 ans. Le jeune autiste va passer près d'une heure et demie avec Jean-François Maillard. Ce bénévole de 70 ans va ainsi tenter de capter son attention par l'imitation en créant un lien de confiance. "Le but, c’est de les ouvrir à des jeux, de l’amener à faire un peu plus, à comprendre ce qu’on fait. Simplement, il faut être en contact permanent et visuel. Il ne faut pas les lâcher des yeux. Il ne faut pas les laisser partir dans leur bulle", explique-t-il.

Owen est pris en charge selon les principes de méthode des "3i" pour "intensive, interactive et individuelle". D’origine américaine, elle consiste à stimuler les autistes par le jeu pour qu’ils retrouvent progressivement le chemin de l’école. Une petite salle de jeu a été aménagée spécialement chez lui. Pour occuper Owen six heures par jour, des bénévoles, parfois très jeunes, se relaient.

Des séances de jeux analysées par un psychologue

Chaque séance est filmée pour être analysée ensuite par un psychologue comme Juliette Laboudigue. Elle s’occupe notamment de suivre le développement des enfants et aide les bénévoles dans leur approche. "Nous, on n’est pas là pour apprendre des choses à l’enfant avec notre caisse à outils. C’est par le biais de la relation qu’ils s’éveilleront et que donc le développement se fera et que les apprentissages suivent."

En trois ans, la mère d’Owen, Elise Tolianker, a vu son fils se métamorphoser : "Avant Owen, il ne parlait pas et aujourd’hui, il a un langage courant voire soutenu. Il peut tenir une conversation. Vous pouvez lui poser une question, il vous répond."  Ces progrès ont permis à l’enfant d’intégrer progressivement une école.

Une évolution majeure rendue possible grâce à l’association "Autisme Espoir Vers l’Ecole". Pour mesurer les progrès de l’enfant, l’association organise tous les mois des réunions entre parents, psychologues et bénévoles pour constamment adapter la méthode. Elle dresse un bilan très positif de cette expérience. Depuis dix ans, elle a suivi 450 autistes et plus de la moitié d’entre eux auraient intégré un cursus à l’école.

Une méthode qui n'est pas validée scientifiquement

Pourtant, cette méthode n’est recommandée par les médecins spécialistes de l’autisme. Elle ne dispose en effet d’aucune reconnaissance ou publication scientifique. Le Pr Richard Delorme, psychiatre, explique : "quand on a des patients qui ont un trouble du spectre autistique, on a envie qu’ils améliorent leurs compétences en socialisation, en communication, qu’ils soient parfois moins rigides. Si on les accompagne bien, ils peuvent être mieux avec l’entourage, plus sociables, moins rigides. Mais est-ce que c’est dû à la thérapie ou alors c’est parce qu’on les a accompagnés ? Pour prouver que la méthode des 3i est efficace, il faut montrer que cette thérapie est plus efficace qu’un simple accompagnement".

Des études sur la méthode des "3i" seraient en cours. Si elle est validée par des études scientifiques, cette approche dite "innovante" pourrait être prochainement recommandée par la Haute Autorité de Santé (HAS).