Cancer : le "droit à l'oubli" enfin adopté

C'est une mesure réclamée depuis de nombreuses années par les associations et les malades du cancer. Les députés ont voté le principe du "droit à l’oubli" lors de l'examen de la loi de santé. Cette mesure permettra aux anciens malades de ne plus parler de leur cancer quand ils voudront contracter un prêt ou obtenir une assurance. Ce "droit à l'oubli" interviendra dix ans après la fin des traitements. Pour les mineurs, il sera réduit à cinq ans.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Entretien avec Axelle Davezac, directrice générale de la fondation ARC pour la recherche sur le cancer, invitée du Magazine de la santé le 30 novembre 2015.
Entretien avec Axelle Davezac, directrice générale de la fondation ARC pour la recherche sur le cancer, invitée du Magazine de la santé le 30 novembre 2015.
  • Que signifie concrètement ce "droit à l'oubli" pour les patients guéris d'un cancer ?

Axelle Davezac : "Cela signifie la possibilité de contracter une assurance sans attendre quinze ans après la fin de leur maladie, mais seulement dix ans. Cela reste encore très long, mais c'est un premier pas.

"Il y a une deuxième mesure qui a été votée également et qui concerne les jeunes, c'est-à-dire les enfants et les adolescents. Ils pourront bénéficier du droit à l'oubli cinq ans après la fin de leur maladie. Elle est destinée aux jeunes qui ont contracté un cancer avant leurs 18 ans."

  • Il y a également une troisième mesure : le non-cumul des surprimes et des exclusions...

Axelle Davezac : "Elle est essentielle puisque non seulement les anciens malades du cancer devaient attendre quinze ans pour contracter une assurance mais, en plus, quand ils arrivaient devant leur assureur, ils devaient, d'une part, payer une surprime en raison de leur historique médical et, d'autre part, ils n'étaient pas assurés pour certains risques, comme le décès par exemple."  

  • Selon vous, ces mesures sont-elles suffisantes ?

​​Axelle Davezac : "Avec d'autres associations comme Rose notamment, nous aurions aimé réduire ce droit à l'oubli à cinq ans. Aujourd'hui, certains cancers se guérissent très bien et on sait que, pour une partie des anciens malades, même moins de cinq ans après la fin de leur maladie, ils n'ont pas un risque supérieur à celui de la population générale. Donc notre demande allait au-delà, mais c’est déjà un premier pas."

  • Est-ce que cette mesure va permettre de faire évaluer les mentalités et de changer le regard de la société sur ces patients ?

Axelle Davezac : "C'est un point essentiel. Il y a bien sûr ce que nous avons obtenu devant la loi. Mais, au-delà de ça, les anciens malades du cancer aspirent à reprendre une vie normale. Des mesures comme le droit à l'oubli aident à changer le regard de la société. On en parle, on s'est beaucoup battu et entendre la parole de ces anciens malades est essentiel aussi."

  • Que faudrait-il faire de plus aujourd'hui pour aider les malades du cancer ?

Axelle Davezac : "Il y a beaucoup de choses qui manquent en France. Il faudrait presque repartir du début. Il y a tout un travail de prévention avant qu’on tombe malade qui doit être fait. Il y a des progrès à faire dans la prise en charge des malades sur le plan social et professionnel.

"On sait aujourd’hui que les personnes confrontées à la maladie ont énormément de mal à retrouver un emploi. Il y a beaucoup de malades qui deux ans après leur diagnostic ont quitté leur emploi. Donc, au delà de la question des assurances, il y a une vraie difficulté à retrouver un contexte social et professionnel comme tout le monde."