Une application pour détecter les récidives du cancer du poumon

Une application mobile française inédite permet de proposer des soins plus tôt aux patients atteints d'un cancer avancé du poumon, voire d'accroître l'espérance de vie, grâce à une meilleure communication entre le malade et son médecin, selon une étude présentée ce 7 juin au congrès de l'ASCO, aux Etats-Unis. Le Magazine de la santé avait consacré un reportage aux premiers tests de cette application en décembre 2013.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Le Magazine de la santé avait consacré un reportage aux premiers tests de cette application en décembre 2013.
Le Magazine de la santé avait consacré un reportage aux premiers tests de cette application en décembre 2013.

L'analyse de l'évolution des symptômes décrits par les patients a servi à concevoir un logiciel (Moovcare®) permettant un suivi personnalisé à distance et une détection précoce d'éventuelles rechutes ou complications.

Grâce à cette application, "nous pouvons détecter des complications et des signes de rechute et proposer des soins plus tôt", a expliqué le docteur Fabrice Denis, spécialiste du cancer du poumon à l'Institut inter-régional de cancérologie Jean Bernard au Man, concepteur de l'application et auteur de l'étude, qui a impliqué 133 patients. "Cette approche ouvre une nouvelle ère de suivi médical: les malades, en contact continu avec leur cancérologue, peuvent donner et recevoir des informations", a-t-il estimé.

Dans cette étude, présentée à la conférence annuelle de l'American Society of Clinical Oncology (ASCO) à Chicago, la survie moyenne des patients utilisateurs du dispositif a été de 19 mois, au lieu de 12 mois dans le groupe témoin qui a reçu un suivi médical standard (visites chez le cancérologue et scanner tous les trois à six mois). Leur qualité de vie a également été jugée meilleure.

Être plus réactif pour adapter le traitement

Les patients équipés de l'application avaient le même calendrier de visites médicales, mais trois fois moins de scanners programmés. Ils ont utilisé le dispositif pour évaluer eux-mêmes leurs symptômes chaque semaine. L'application analyse au fur et à mesure les données pour douze symptômes et transmet les résultats au cancérologue. En cas de changements spécifiques, le médecin est alerté et adapte le traitement.

Selon les données présentées à l’ASCO, un an après le début de l'étude, 75% des patients équipés de l'application étaient encore en vie, contre seulement 49% dans le groupe témoin. Les taux de rechute étaient similaires dans les deux groupes avec 51% et 49% respectivement. Toutefois, l'état général des patients au moment d'une rechute était assez bon parmi ceux qui utilisaient l'application, ce qui a permis à la grande majorité (74%) de pouvoir suivre le traitement recommandé. Par comparaison, seulement un tiers de l'autre groupe était suffisamment robuste pour supporter un nouveau traitement.

L'application aurait également permis de réduire de 50% le nombre moyen de scanners par malade et par an.

Une mise en œuvre difficile sur le terrain

Ce système n'aurait pas vraiment accru la charge de travail des cancérologues, ajoutant seulement à leur emploi du temps quinze minutes par semaine de suivi pour 60 patients. Cela aurait même entraîné une diminution des appels téléphoniques des patients au cabinet de leur médecin, a noté le Dr Denis.

Mais la Dr Patricia Ganz, une cancérologue de la faculté de médecine de l'Université de Californie à Los Angeles, a souligné lors d'une conférence de presse qu'il fallait en fait "mobiliser une infirmière ou d'autres personnels dans le cabinet pour regarder les données transmises par les malades et y répondre, ce qui est le vrai coût supplémentaire de ce système."

Pour le Dr Greg Master, "il faut réfléchir à la manière de mettre en oeuvre un tel système, qui nécessite un changement dans la manière dont les équipes médicales travaillent et aussi pour éduquer les malades". Cette technologie "pourrait aussi effrayer les patients mal à l'aise pour utiliser une application de mobile", a-t-il pointé devant la presse. Mais, a ajouté ce cancérologue, "cette recherche aide certainement à avancer" dans l'utilisation des nouvelles technologie pour les soins des malades.

Le Dr Denis a précisé que cette application, encore un prototype, serait commercialisée début 2017 par la société israélienne Sivan Innovation, mais que son prix n'avait pas encore été déterminé.

La tumeur du poumon est le cancer le plus fréquent dans le monde avec 1,8 million de nouveaux cas en 2012 et 1,59 million de décès, selon des chiffres cités par l'ASCO.