Une cérémonie pour ceux qui donnent leur corps à la science

Pour la première fois, des familles ont pu rendre un dernier hommage à leurs proches qui ont donné leurs corps à la science. Ces corps, utilisés par les étudiants et les chirurgiens, ne sont pas restitués à la famille, les privant alors d'obsèques… Grâce à cette cérémonie, le deuil des proches pourrait être facilité.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Une cérémonie pour ceux qui donnent leur corps à la science

Dans la salle principale du crématorium du Père-Lachaise, environ 200 personnes ont assisté à une cérémonie collective laïque le 17 janvier, à la mémoire d'une cinquantaine de leurs proches qui ont donné leur corps à la médecine. C'est la première fois qu'un tel hommage est organisé à Paris, pour des familles habituellement privées de cérémonie. Le but est avant tout de combler un vide : lorsqu' une personne donne son corps à la science, la famille n'a plus de dépouille pour les obsèques. Le travail de deuil devient donc plus difficile.

"Un tel acte généreux prive les familles d'un enterrement en bonne et due forme" explique à l'AFP Renaud Peters, maître de cérémonie au funérarium qui a conduit l'hommage. Les rituels de deuil, individuels ou collectifs, sont des actes "précieux" pour chacun. Pour y remédier, les services funéraires de Paris ont donc décidé de régulariser ce type de cérémonies. Elles auront désormais lieu deux fois par an, en septembre et janvier, pour tous les proches qui le souhaitent. L'hommage comprend notamment une lecture des noms des donateurs.

Témoignage et recueillement

"Je suis venu dire au revoir à mon frère" raconte Françoise, l'une des personnes venues assister à la cérémonie. Les larmes aux yeux, elle dit avoir été "privée de cérémonie" lors de la disparition de son frère et avoir eu du mal à admettre cette séparation. Christine affirme être venue "pour mieux comprendre" la décision de son père disparu en novembre.

Des représentants de la Faculté de médecine de Paris et de l'Ecole de chirurgie de l'APHP (Assistance Publique Hôpitaux de Paris) ont souligné durant la cérémonie l'importance des dons pour l'apprentissage des élèves en médecine et en chirurgie. "Tous les cours qu'on organise ne seraient pas possibles sans ces dons" explique Djamel Taled, coordinateur des enseignements à l'Ecole de chirurgie. "Je souhaite exprimer notre reconnaissance pour cet acte rare, généreux et solidaire" a-t-il déclaré aux familles.

Comment se passe le don ?

Chaque année en France, 2.600 personnes font don de leur corps à la science, dont 800 en région parisienne. Un chiffre qui représente 0,5% des décès. Leurs dons permettent aux facultés de médecine et hôpitaux de réaliser des travaux de recherche et d'enseignement. Congelés, réfrigérés ou embaumés, les corps sont disséqués par les chercheurs et les futurs chirurgiens, pour qu'ils puissent s'exercer en conditions réelles.

A Paris, les corps légués sont transportés à l'Ecole de chirurgie ou à la Faculté de médecine, puis conservés pour être utilisés ultérieurement. Certains corps peuvent être utilisés jusqu'à deux ans après le décès. Après utilisation, les corps font l'objet d'une crémation anonyme au Père-Lachaise (1). Les cendres sont ensuite dispersées au cimetière de Thiais (94) où une stèle a été érigée à la mémoire des donateurs.

 

(1) Dans certains cas exceptionnels, les cendres peuvent être remises à la famille


En savoir plus sur le don du corps à la science :

Comment léguer son corps ?

Si vous souhaitez donner votre corps à la science, il faut vous adresser à la Faculté de médecine la plus proche de chez vous, qui vous délivrera une carte de donateur. Bien qu'il puisse être gratuit (comme à Paris), le don est souvent payant. Le donateur peut avoir à débourser jusqu'à 950 euros… En cas de changement d'avis, il suffit de détruire la carte de donateur. Dans certains cas, le corps peut être refusé : s'il s'est écoulé plus de 48 heures depuis le décès par exemple, ou en cas de suicide ou d'accident de la route.