Résidus de pesticides dans l'organisme : les Français surexposés

L'Institut national de veille sanitaire (InVS) a publié, le 29 avril 2013, une étude reflétant l'exposition de la population française aux pesticides. Pour la famille d'insecticides la plus utilisée, le taux de résidus dans l'organisme se révèle plus élevée qu'en Allemagne ou que dans les pays d'Amérique du Nord.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Entretien avec André Cicolella, chercheur à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris)
Entretien avec André Cicolella, chercheur à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris)

A partir de l'analyse de prélèvements urinaires, réalisés en 2007 auprès d'un échantillon de 400 personnes, les experts de l'InVS ont cherché la présence de 42 biomarqueurs, associés à l'exposition de trois familles de pesticides et aux PCB (polychlorobiphéniles).

Les trois classes de pesticides concernées sont les pyréthrinoïdes (les plus communs, utilisés notamment pour le traitement des cultures et les applications domestiques), les organophosphorés (efficaces sur les insectes et les acariens mais dont les usages ont été fortement restreints en France) et les organochlorés.

L'InVS a déterminé que la concentration de résidus de pyréthrinoïdes mesurée était notablement élevée - bien supérieure, à tout le moins, à celles observées en Allemagne, au Canada et aux Etats-Unis. Selon les signataires de l'enquête, la consommation de certains aliments traités avec ce pesticide (issus de l'agriculture ou cultivés en potager), mais également l'utilisation domestique de certains traitements antipuces, sont corrélées avec les plus fortes concentrations observées.

Pour les pesticides organophosphorés, la France présente des concentrations urinaires supérieures à celles des Américains et des Canadiens. Elle affiche en revanche des niveaux inférieurs à l'Allemagne, dont les chiffres datent de 1998. Pour cette catégorie de pesticides, plusieurs facteurs semblent influencer les marqueurs urinaires (âge, corpulence, alimentation) et "également le lieu de résidence et notamment la surface agricole dédiée à la culture de la vigne [ou] l'usage d'insecticides dans le logement".

Pour la dernière famille de pesticides étudiés, les organochlorés, "les mesures et restrictions d'usage semblent montrer leur efficacité" dans la plupart des cas. Ainsi, les taux de DDT - insecticide interdit en France depuis 1971 - apparaissent "voisins, voire plus faibles" que dans le reste de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Néanmoins, en 2007, deux représentants de cette famille de pesticides apparaissaient présents dans l'organisme des Français dans des proportions singulièrement élevées.

Utilisé dans certains désodorisants et antimites, le premier organochloré est cependant interdit depuis 2009. Pour le second (le 2,4-DCP, normalement transformé au cours de la fabrication de certains herbicides), les concentrations apparaissent deux à trois fois supérieures à celles observées dans la population générale allemande, et légèrement supérieures à celles de la population américaine.

Les PCB persistent dans l'organisme malgré leur interdiction

Les scientifiques de l'InVS ont également évalué les taux de PCB (polychlorobiphéniles) dans l'organisme. Ceux-ci sont interdits en France depuis 1987. Si leur concentration moyenne a été divisée par trois en 20 ans (1986-2007), 13% des femmes en âge de procréer (18-45 ans) avaient encore, en 2007, des niveaux supérieurs à ceux recommandés par les autorités sanitaires. Ceci est imputé à "l'héritage historique de la pollution aux PCB qui reste marquée en Europe et en France". Les PCB, autrefois utilisés dans du matériel électrique, sont des substances qui s'accumulent dans les graisses, et l'organisme de certains poissons.

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