Myopathie de Landouzy-Dejerine : tous les gènes responsables enfin identifiés

Deuxième type de myopathie en terme de fréquence chez l'adulte, la dystrophie musculaire facio-scapulo-humérale (DMFSH) posait une énigme au monde de la recherche. En effet, si la présence d'une mutation bien identifiée du chromosome 4 explique seule une majorité des cas, cette anomalie est absente chez certains patients. A cas clinique apparemment identique, un ou plusieurs autres gènes étaient vraisemblablement en cause. Une équipe mixte du CHU de Nice et de l'Université de Leiden (Pays-Bas) vient de résoudre ce cas d'école.

Florian Gouthière
Rédigé le
Myopathie de Landouzy-Dejerine : tous les gènes responsables enfin identifiés

Une mutation du chromosome 4, qui entraîne l'ouverture de la séquence ADN et initie la production non contrôlée d'une protéine toxique dans les muscles, est depuis longtemps identifiée comme la cause de la majorité des myopathies de Landouzy-Dejerine (l'autre nom de la DMFSH). Pourtant, certains patients déclarant tous les symptômes cliniques de la maladie ne présentaient pas cette mutation. Aucun dénominateur génétique commun ne semblait à même de réunir l'ensemble ces personnes.

Le dénominateur commun

Au terme d'une traque de plusieurs années, l'équipe du professeur Desnuelle, qui a récemment publié ses travaux dans la revue Nature Genetics, vient d'élucider le mystère. L'origine des DMFSH de second type n'était pas à chercher sur un, mais deux chromosomes.

Deux anomalies distinctes qui doivent conjointement figurer dans le patrimoine génétique pour engendrer le processus de la DMFSH. Une particularité qui explique notamment pourquoi la maladie peut émerger chez plusieurs enfants issus d'un couple de parents sains - chaque mutation n'ayant pas isolément d'expression notable.

La première de ces anomalies discrètes se trouve localisée sur le chromosome 18. Il s'agit d'une modification d'un gène, le SMCHD1, dont l'expression provoque l'ouverture d'un brin d'ADN... sur le chromosome 4. Brin où se trouve précisément le gène qui code la protéine toxique responsable de la DMFSH de type 1.

La seconde anomalie consiste dans la production par le chromosome 4 d'une molécule qui stabilise la toxine (DUX4), lui offrant ainsi la possibilité de se déployer dans l'organisme.

"Ce processus de stabilisation est également à l'oeuvre dans la DMFSH de type 1" nous explique le docteur Sacconi, co-auteure de l'étude. "Cependant, les processus en oeuvre dans les deux formes de la myopathie sont fondamentalement distincts. Dans le type 1, l'ouverture de l'ADN [au niveau du gène qui va produire la toxine] découle de la faible longueur d'une chaîne moléculaire. Dans le type 2, l'ouverture est commandée par la version mutée du gène présent sur le chromosome 18."

Les deux formes de DMFSH découlent donc bien de l'expression d'une unique toxine, produite au niveau d'un seul et même gène. Seul le processus qui déclenche la transcription de la séquence génétique diffère.

Les conditions dans lesquelles les versions incriminées de SMCHD1 interagit avec le chromosome 4 sont encore mal définies. Celles-ci sont vraisemblablement très spécifiques, puisque la myopathie de Landouzy-Dejerine de type 2 peut rester en sommeil durant des décennies.

La découverte de l'équipe niçoise n'offre pas des perspectives exclusivement diagnostiques. En effet, par précaution méthodologique, les patients souffrant d'une DMFSH de type 2 étaient jusqu'à présent exclus des essais thérapeutiques cliniques. Les connaissances acquises permettront de déterminer en toute objectivité quels protocoles justifient une telle réserve.

Quid de la myopathie de Landouzy et Dejerine

Décrite dès 1884 par les docteurs Landouzy et Dejerine, la DMFSH est une myopathie caractérisée par l'atteinte progressive des muscles du corps. Débutant à partir du visage, elle gagne peu à peu - et de façon asymétrique - les omoplates, les bras, les muscles abdominaux et les membres inférieures. Plusieurs problèmes annexes lui sont parfois associés, parmi lesquels une mauvaise vascularisation de la rétine, une atrophie de la langue ou une surdité partielle. Des cas d'atteinte cardiaque sont également recensés.

Dans la majorité des cas, les symptômes apparaissent à la fin de l'adolescence. Cependant, la DMFSH peut tout aussi bien se déclarer dans la petite enfance, ou très tard à l'âge adulte.

Cette maladie est la myopathie héréditaire la plus fréquente chez l'adulte, et la troisième tous âges confondus. Une personne sur 20 000 serait atteinte.

Sur les 3.250 cas français estimés, 30 à 50% présenteraient un handicap les empêchant de travailler. 10 à 20% seraient en fauteuil roulant.

Sources : sites de l'AFM-Téléthon  et de l'Observatoire National Français des Patients Atteints de DMFSH

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